« Mais je veux savoir si je puis te rapporter avec franchise ce qui se passe là-bas, ou si je dois abréger mon récit. Car je redoute tes promptes colères, roi, ton caractère irascible et tyrannique. »

Euripide, Les Bacchantes

1964 : Civil Rights Acts, la loi abolissant officiellement la ségrégation aux États-Unis

Le combat pour l’égalité raciale n’est pas terminé pour autant.[1]

Origines du Hip-Hop

  • Apparu dans les années ’70 au Bronx (NYC) dans les ghettos

Ghetto : Quartier où une communauté vit à l’écart, dans ce cas-ci les ghettos noirs dans les villes américaines

  • Mouvement contestataires des jeunes Afro-Américains pour exprimer leurs revendications – résistance politique
  • Multidisciplinaire : le Rap, le DJ, la danse (break dance), le graffiti (art de résistance par excellence), le beat box
  • Black parties (fêtes de quartier)
  • Inspiré par les discours subversifs des Black Panthers (mouvement révolutionnaire de libération afro-américaine)
  • Propos engagés, provocateurs
  • Moyen culturel de remplacer la violence par des mots

Dans les années 2000, les Blancs s’approprient la tendance du Hip-Hop et le rendent populaire en oubliant parfois les origines du mouvement (public innoncent).

Matière hebdomadaire – Résumé des textes – Recherche

Jeff Chang

  • Ambiance d’Injustice, d’inégalité
  • « Devons-nous lutter pour cette nation ou construire la nôtre? Devons-nous sauver l’Amérique ou nous-mêmes? »
  • S’approprier leur place légitime
  • Rénovation urbaine : commerçants délogés, pauvres familles immigrantes déracinées des ghettos de Manhattan = Rassemblement dans des quartiers tels qu’East Brooklyn et le South Bronx où il y a beaucoup de logements sociaux, mais pas d’emploi
  • Blocs identiques, isolés, mal entretenus, propices à la criminalité

Semblables à des prisons? À force d’être traité ainsi…

  • Installés dans des quartiers juifs, irlandais et italiens, ils subissent de la violence par les gangs de jeunes Blancs = gangs de jeunes Noirs et Latinos qui veulent se protéger, prendre du pouvoir, puis en viennent à y trouver de la satisfaction
  • Mouvements optimistes pour les droits civiques qui se transforment en rage, en irritation = crimes contre les leurs
  • Incendies des immeubles pour faire de l’argent

Et la haine la plus intense naît de la peur, qui force au silence et canalise la passion vers un violent désir de revanche, vers l’annihilation imaginaire de l’objet haï, un peu comme dans ces rites de vengeance clandestin où les persécutés trouvent à extérioriser sinistrement leur rage.

George Eliot, Daniel Deronda

  • Chômage, pauvreté
  • Laisser-aller qui s’installe, pas d’encadrement ni de soutien – libéralisme

James C. Scott

Texte public : Discours du dominé en présence du dominant

Normes sociales (étiquettes) nous forcent à entretenir des relations saines avec autrui au détriment de notre honnêteté – Obligation?

La prudence, la crainte, ou le désir d’obtenir certaines faveurs modèlent le comportement du dominé, afin de satisfaire les attentes du dominant.

Le pouvoir des Blancs et leur aversion envers les personnes de couleur obligent ces derniers à pratiquer l’art de la dissimulation quand nécessaire :

Éviter d’être désagréable, cacher leurs biens, leur argent, paraître moins intelligent, être silencieux (se montrer comme ils les considèrent pour être tranquilles et en sécurité)

Donc, les groupes dominants les voit comme des menteurs, des tricheurs à cause de cette dissimulation. [Ils en sont la cause!]

Les groupes subordonnés acceptent cette domination, se montrent consentants. [S’opposer ou mourir?]

« Plus le pouvoir est menaçant, plus le masque se fait épais. »[2]

[Plus l’écart et la méfiance grandissent entre les groupes. Ça alimente la haine du côté des dominés qui ne peuvent se montrer tels qu’ils sont réellement]

Texte caché : Discours qui a lieu dans les coulisses, à l’abri du regard des puissants Liberté?

Les groupes dominés doivent trouver différentes manières de faire passer leur message sans enfreindre la loi (dissimulation du texte caché dans le texte public)

« Il est impossible d’avoir accès au texte caché de nombreux groupes dominés d’une grande importance historique. Ce que l’on peut retrouver, par contre, c’est ce qu’ils ont réussi à introduire, sous des formes voilées ou bien mises en sourdine, dans le texte public. »

Exemples de dissimulation :

Masquer le message (ironie) ou masquer le messager (anonymat) pour éviter les représailles – pacifique  

Anonymat 

Ex. graffitis, noms d’artistes, masqués dans les vidéoclips

Euphémisme : Déguiser le message

Ex. Rap

Parler dans sa barbe (de manière inaudible): Transmettre une idée de moquerie, d’insatisfaction ou d’animosité indistincte et qu’il est toujours possible de nier

Ex. un grognement, un soupir, un gémissement, un gloussement, un silence qui arrive au bon moment, un clin d’œil ou un regard fixe qui dévisage

« Sachant qu’ils peuvent être arrêtés, battus, voire abattus s’ils jettent des pierres, les adolescents utilisent à la place le regard, ce qui présente moins de danger, mais qui donne toutefois un sens littéral à l’expression : « Si un regard pouvait tuer… » »

Impact de la dominance : individu aux apparences insensible

Rap Battle : texte caché (sans crainte), qui n’a pas besoin d’être soigné, entre individus qui ont vécu des choses semblables

[Tout dépend de l’espace public] Ils ne sont pas dans un théâtre de civilité, sinon ils auraient utilisé des techniques de dissimulation pour s’adresser au groupe dominant

Dans quel but? Être capable de contrôler sa colère pour survivre, se préparer aux insultes des dominants

Le message passé dans les chansons Hip-Hop correspond-il à ce qu’ils vivent vraiment ou à la façon qu’ils sont vus par le groupe dominant ?

Définition de concepts 

Apathie : contraire d’empathie, indifférence, découragement / Peut-on réellement jouer un rôle? Société de désintérêt, de sentiment d’impuissance et de manque d’indignation[3]

Hégémonie : Suprématie, domination d’un groupe sur un autre

Résistance politique : grève, manifestation, désobéissance civile

Libéralisme : Courant de pensée qui prône la défense des droits individuels, au nom d’une vision fondée sur l’individu et la coopération volontaire entre les humains qui repose donc sur la responsabilité individuelle

Neutralité à l’égard des différentes conceptions controversée de la vie bonne[4]

[Se fermer les yeux sur la détresse des minorités opprimées parce que le système libéral est impartial? Le libéralisme à ses limites quand il nuit à autrui]

La critique communautarienne du libéralisme[5]

Par Michael Walzer

La société libérale est dépourvue de toutes traditions; chaque individu est seul et désengagé; il accepte les obligations sociales pour éviter les représailles; il ne tient qu’à sa sécurité; il est préoccupé par ses intérêts personnels seulement.

Il n’y a pas de consensus ni de débat public sur la nature de la vie bonne; l’apathie politique règne; droit et liberté de choisir sans toutefois être guidé.

Le propre de toute société humaine est que les individus qui y sont élevés se trouvent engagés dans des réseaux de relations, des réseaux de pouvoir, et des communautés de sens. 

Communautarisme : Conception qui soutient que l’individu n’existe pas indépendamment de ses appartenances, qu’elles soient culturelles, ethniques, religieuses ou sociales / Attitudes ou aspirations au sein de minorités et moins couramment au sein de majorités (culturelles, religieuses, ethniques…) visant à se différencier volontairement, pour s’entraider, voire pour se dissocier du reste de la société

Le Rap au Québec

Ils sortent de prison et on les empêche de rapper[6]

Par Simon Coutu

Mise en contexte :

« Après avoir passé des années en prison, plusieurs street rappeurs se voient interdits de pratiquer librement leur art. Les autorités carcérales considèrent leurs textes comme une glorification du mode de vie délinquant. Mais les artistes estiment plutôt que cette mesure brime leur liberté d’expression et les empêche de s’accomplir professionnellement. »

  • Le Rap n’est pas vu comme un travail, pris au sérieux [Pourquoi ce style de musique spécifiquement? À cause de ses origines?)]
  • Pas de travail, pas d’argent, pas de chance de réhabilitation, retour en prison… Ça alimente la haine et la division, car ils ne se sentent ni libres ni respectés

[C’est un cercle vicieux]

« Le problème, ce n’est pas de parler de son passé, c’est plutôt la manière qu’on l’aborde, ajoute M. Henry. On se demande alors si la personne a des regrets et si elle a réfléchi aux impacts de ce qu’elle a fait. S’il y a introspection, je crois que ça peut faire une vraie bonne toune de rap. »

  • Représentation de ce qu’ils vivent (crimes, violences, …) : façon de s’exprimer comme n’importe quel artiste le fait
  • Méfiance envers ce qu’on ne connaît pas (préjugés) et ce qu’on en dit (journaux, télé, …)
  • S’exprimer et passer un message avant d’inciter

« M’enlever mon art, c’est l’équivalent de me déshumaniser. Surtout qu’en ce moment, mes écrits sont positifs. C’est sûr qu’il y a des tracks dures, parce que c’est la vie que j’ai vécue. Mais en aucun cas le fait que je chante n’est un danger pour la société. Je n’incite pas à la violence. » – Frékent

  • Reconnaître davantage le travail que ça demande, à sa juste valeur (c’est un art comme un autre)
  • Musique « de rue » parce que tabou et enterrée

[Qu’est-ce que ce serait si on leur donnait du support, du mérite et des moyens? Comme au États-Unis par exemple…]

Peut-on vraiment utiliser les paroles d’une chanson pour bâtir un dossier criminel et construire des preuves?

Bien qu’ils racontent leur vécu, ce n’est pas nécessairement actuel…

Comment le Rap est vu dans la rue?

  • Compétition (le plus dangereux)
  • Le street rapper est respecté, plus que sa musique même… Il ne faut pas prétendre vivre cette vie-là

Pour Connaisseur Ticaso, ses écrits sont meilleurs depuis qu’il a changé de mode de vie. Il peut porter un regard extérieur et plus critique sur son passé contrairement à ceux qui écrivent ce qu’ils vivent au quotidien.

Le Rap est parfois le seul bon issu : ça n’implique pas de criminalité et c’est une option pour ceux qui ont arrêté l’école ou qui ne veulent pas travailler de 9@5

L’artiste doit prendre au sérieux sa musique s’il veut que ça marche (contrairement à ce que certains pensent). Il doit aussi être appuyé…

Les maisons de disques sont de plus en plus intéressées par le Hip-Hop. La scène hip-hop est appréciée au Québec.

Plutôt que de voir le Rap comme un incitateur au mal, pourquoi pas s’en servir pour changer les choses, se conscientiser et se sensibiliser à une réalité qui n’est pas la nôtre et qui mérite notre attention et notre support. Ce n’est pas juste de la drogue et de la violence, c’est un manque de ressources et d’éducation dans les quartiers défavorisés. On essaie de faire taire une problématique qui est là, sous nos yeux. Le rap est en quelque sorte une résistance politique qui soulève plusieurs problématiques sociétales.

Street rap : le son de la rue[7]

Par Rad

Chaque individu est un produit de son environnement, il devient ce qu’il voit, ce qu’il côtoie. Il est influencé par ses amis, sa famille.

« La vie m’a mené à ça » – Izzy-S [famille pauvre, trop jeune pour travailler, comment faire de l’argent rapidement?]

  • Ils ne cherchent pas à encourager la violence : c’est ce qu’ils vivent, ce qu’ils connaissent, ce qu’ils ont à raconter
  • Ils savent que ce n’est pas bon, ils cherchent à donner un avertissement…
  • C’est peut-être la seule façon de montrer ce qui se passe réellement et de se faire écouter…
  • Les rappeurs deviennent des messagers, des témoins de ce qui se passe dans la rue
  • C’est un point de vue important même si ça dérange (c’est à l’origine du mouvement)

Sentiment d’appartenance menacé 

[Apathie politique et communautarisme]

  • Les jeunes dans les quartiers défavorisés (parfois de famille immigrante) ne se reconnaissent pas dans la culture québécoise, ils se réfugient dans la culture hip-hop américaine

*Street rap : violence, drogue, arme, sexe (populaire aux États-Unis dans les années ’80)

  • Le Québec se montre indifférent, ignorant quant à ce qu’ils vivent (d’où l’importance de prendre conscience de cette réalité, de creuser)
  • Ils développent un sentiment d’appartenance à la rue : c’est l’argent, les amis, la famille, la survie, la débrouillardise

Objectif commun

  • Sortir de la rue, se sortir de la pauvreté, réussir
  • Les rappeurs qui ont du succès deviennent un modèle par cet accomplissement

[Réussir tout en rendant hommages à leurs racines et en restant eux-mêmes]

  • La majorité des rappeurs qui ont une carrière délaissent la rue

Dilemme

La musique ou la rue (prison, mort)

Évolution

  • Le Rap gagne en popularité au Québec (radio, festival, …) mais principalement le Hip-Hop plus commercial d’artistes blancs
  • Crédibilité gagnée chez les jeunes (issus des communautés ethniques encore plus)
  • Le street rap n’est pas à la radio et plusieurs spectacles sont annulés par la police

L’avenir du street rap dépend de l’industrie musicale. Il faut les aider à grandir, leur ouvrir les portes, remplir leur salle et vendre leur musique

Rap féminin

  • Milieu masculin misogyne, reculé, très stéréotypé
  • Certaines s’approprient l’hyper sexualisation alors que d’autres s’en détachent complètement
  • Forme de féminisme

La chanson est un bon médium pour transmettre des messages socio-politique : grand nombre d’écoutes + les gens ont tendance à idolâtrer les artistes, donc à les écouter (positif quand le message est positif…)

Ex. Doo wop (That Thing) par Lauryn Hill

Chanson féministe qui remet en question le rôle de la femme par rapport à l’homme, qui parle d’hyper sexualisation et d’abus de pouvoir, qui montre aux femmes à se voir à leur juste valeur

Médiagraphie

Radio-Canada. (2018, 12 janvier). Journée Martin Luther King : la ségrégation raciale expliquée par René Lévesque. Radio-Canada.ca. https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1077296/martin-luther-king-droits-civiques-etats-unis-afro-americains-archives

Lafrance, V. (2016, août 29). Combattre l’apathie politique. HuffPost. https://www.huffpost.com/archive/qc/entry/jeunes-implication-politique-vote-apathie-jeunesse_b_11529106

Coutu, S. (2018, août 14). Ils sortent de prison et on les empêche de rapper. Vice. https://www.vice.com/fr/article/mb4kyq/ils-sortent-de-prison-et-on-les-empeche-de-rapper

Documentaire – Street rap « Le son de la rue » (Izzy-S, Tizzo, Lost, Souldia, Enima, White-B, MB). (2018, 9 novembre). YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=O9x5SHFLLFM

Tous les textes trouvés sur : http://www.philo-cvm.ca/


« Mais je veux savoir si je puis te rapporter avec franchise ce qui se passe là-bas, ou si je dois abréger mon récit. Car je redoute tes promptes colères, roi, ton caractère irascible et tyrannique. » – Euripide, Les Bacchantes

L’oppression des communautés afro-américaines a assombri les États-Unis durant des siècles. Voient le jour des mouvements révolutionnaires de libération afro-américaine tels que les Black Panthers qui influencent la culture Hip-Hop par leurs discours subversifs. Le Hip-Hop puise ses racines à travers les revendications des jeunes afro-américains au cours de cette période. Il regroupe plusieurs formes d’art d’expression comme le Rap, le Breakdance et le graffiti. Il est pertinent de saisir l’essence-même du Rap et de se demander pourquoi un art comme celui-ci est aussi marginalisé, voire porteur de préjugés encore aujourd’hui. Comment se fait-il que nous ayons de la difficulté à accepter des pratiques qui culturellement n’appartiennent pas à la majorité?

Il faut d’abord comprendre les motivations de la culture Hip-Hop.  Dans les années ’70, à New York, le combat pour l’égalité raciale est loin d’être terminé. Le pouvoir des Blancs et leur aversion envers les personnes de couleurs contribuent à faire naître une haine chez ces derniers. La rénovation urbaine déloge les commerçants et déracine les familles pauvres immigrantes de Manhattan pour les envoyer dans le Bronx qui regorge de logements sociaux, mais où les emplois se font rares. Tous sont entassés dans des immeubles identiques et mal entretenus, semblables à des prisons. Les mouvements optimistes pour les droits civiques donnent place à la rage et au découragement dû au chômage généralisé, à la pauvreté et aux persécutions quotidiennes. Un tel climat est propice à la révolte : certains commandent l’incendie de leur propre appartement en échange d’un peu d’argent et d’autres prennent les armes. Un laisser-faire s’installe dans un libéralisme, il n’y a ni encadrement ni soutien.

Entre temps, la domination exercée par les Blancs sur les subordonnés les oblige à adopter certaines manières en leur présence pour éviter quelques représailles. Les normes sociales les forcent à entretenir des relations saines avec autrui au détriment de leur propre valeur humaine. Les minorités ethniques apprivoisent alors l’art de la dissimulation. Ils évitent de se faire remarquer, se montrent parfois moins intelligents qu’ils ne le sont et cachent leur argent ou leurs biens. En fait, ils se présentent tel qu’on les traite, aussi désolant que ça puisse paraître.

« Plus le pouvoir est menaçant, plus le masque se fait épais. »[8] L’écart et la méfiance grandissent entre les groupes tout en alimentant la haine vis-à-vis de ceux qui doivent se cacher. Paradoxalement, les groupes dominants les perçoivent comme des menteurs à cause de cette dissimulation dont ils sont la cause.

La communauté afro-américaine, entre autres, développe quelques techniques pour faire passer son message sans enfreindre la loi. Les individus se font anonyme avec des graffitis ou des noms d’artistes, d’autres s’approprient les regards et les bruits comme le « tchuipz » pour exprimer leur désapprobation. Ils en viennent même à déguiser le message par ironie et euphémisme avec le Rap, pour en minimiser les conséquences. Peu à peu, on constate que le Rap devient un moyen culturel de remplacer la violence par des mots. Le Rap Battle, par exemple, avait pour objectif de se désensibiliser aux insultes tout en contrôlant sa colère.

C’est dans cet esprit que le Rap, symbole de résistance politique, existe tel qu’on le connaît aujourd’hui. Il incarne parfaitement la dissimulation du texte caché dans le texte public, c’est-à-dire le discours qui a lieu à l’abri du regard des puissants et le discours qui est fait en présence du dominant.

Dans les années 2000, la musique hip-hop explose aux États-Unis, alors que la pente semble plus abrupte au Québec. Les artistes émergeants ne reçoivent pas la même reconnaissance. Aujourd’hui, il est vrai qu’on peut en entendre à la radio et dans les festivals, mais il s’agit d’un Hip-Hop plus commercial (et disons-le, plus blanc). Le street rap n’est pas aussi accepté et valorisé tandis que les thèmes abordés sont ceux de la drogue, de la violence et du sexe. Certains pensent que les paroles incitent, voire glorifient des sujets comme ceux-là, ce à quoi les rappeurs répondent qu’ils ne cherchent pas à encourager la criminalité : c’est ce qu’ils vivent, ce qu’ils connaissent, ce qu’ils ont à raconter. Ils partagent leur vécu comme les chanteurs le font depuis toujours et si ça choque, c’est que c’est loin de notre réalité.

Le Rap semble positif dans la mesure où il représente parfois le seul issu possible qui n’implique pas de criminalité pour des jeunes qui ne vont plus à l’école et qui vivent dans des quartiers défavorisés. L’art en lui-même est inoffensif, il permet de s’affirmer et de rassembler. Les jeunes, d’autant plus venant de familles immigrantes, ne se reconnaissent pas dans la culture québécoise. Ils développent un sentiment d’appartenance à la rue : l’argent, les amis, la famille, la survie. Malheureusement, le Québec se montre indifférent ou peut-être ignorant quant à ce qu’ils vivent. Toutefois, il est clair que l’objectif commun est de se sortir de la rue, de la pauvreté et de réussir.  

Le Rap ne semble pas être considéré par tous comme un vrai emploi; on l’interdit d’ailleurs à ceux qui sortent de prison et il est parfois utilisé pour monter des casiers judiciaires sur le dos des artistes. Pourquoi faudrait-il leur retirer une pratique aussi lourde d’histoire? On ne reconnaît clairement pas le travail que ça demande, ou du moins on ne veut pas le reconnaître.  

Le Rap est un outil de sensibilisation et de conscientisation à une réalité qui n’est peut-être pas la nôtre, mais qui mérite notre attention et notre soutien. Ce serait facile de les blâmer et de les accuser de criminels, mais c’est avant tout un manque de ressources et d’éducation. On essaie de faire taire une problématique qui est juste là, sous nos yeux. Les rappeurs qui connaissent du succès le disent eux-mêmes : la rue n’est pas le chemin à prendre, mais ce n’est pas un choix non plus puisqu’ils y grandissent. S’ils en sont venus à cette conclusion, c’est qu’ils ont eu la chance de s’en sortir, de prendre du recul pour constater que c’était destructeur. Ils cherchent en quelque sorte à donner un avertissement.

Les rappeurs deviennent des messagers : c’est peut-être la seule façon de se faire écouter et de montrer ce qui se passe réellement dans la rue. Tout compte fait, c’est un point de vue important même si ça dérange. La provocation est à l’origine du mouvement, non?

Il faut accepter que ce genre de propos soit véhiculé tant que ça existera. Il y a une manière d’aborder des sujets plus sensibles, bien entendu. Néanmoins, il est clair que les institutions ont un rôle à jouer, d’abord en donnant à chacun une place légitime au sein de la société avec les mêmes chances, puis en évitant de perpétuer certains préjugés à l’égard des minorités ethniques dans les médias par exemple. De plus, il est important de respecter la culture hip-hop, de la faire rayonner et d’en être fier sans toutefois se l’approprier et s’en accorder le mérite. C’est à un système tout entier qu’il faut s’attaquer, au privilège blanc, mais il y a moyen de se montrer à l’écoute et d’ouvrir nos portes, comme devrait le faire l’industrie musicale.


[1] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1077296/martin-luther-king-droits-civiques-etats-unis-afro-americains-archives

[2] http://www.philo-cvm.ca/?page_id=886

[3] https://www.huffpost.com/archive/qc/entry/jeunes-implication-politique-vote-apathie-jeunesse_b_11529106

[4] http://www.philo-cvm.ca/?page_id=556

[5] http://www.philo-cvm.ca/?page_id=561

[6] https://www.vice.com/fr/article/mb4kyq/ils-sortent-de-prison-et-on-les-empeche-de-rapper

[7] https://www.youtube.com/watch?v=O9x5SHFLLFM

[8] http://www.philo-cvm.ca/?page_id=886«

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